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À qui s'adresse le travail à temps partiel ? À quoi sert-il ?

Temps partiel

Enquête sur le caractère (in)volontaire du temps partiel féminin.

Depuis les années 80, l'augmentation du nombre des travailleurs à temps partiel est manifeste : 27 % des salariés en 2017 contre 7, 5 % en 1980 travaillaient à temps partiel. En 2017, on comptait 1.156.000 travailleurs à temps partiel dont 833.927 femmes, soit 80 % du total. La part des femmes travaillant à temps partiel est passée de 20 % à 44% durant la même période. Celle des hommes a augmenté également mais dans de moindre proportions. Mais la réalité de cette forme de travail indique bien des différences par secteur, par tranche d'âge, par niveau de qualification.

Au fil des années, les effets préjudiciables de ce type d'emploi sur les personnes qu'il concerne, tant durant l'occupation qu'après, ont régulièrement été dénoncés. Contrairement à sa mission originelle de protection des travailleurs, le droit du travail n'améliore malheureusement pas les conditions du travail à temps partiel. Au contraire, elles se dégradent sous l'effet d'une flexibilité accrue par la pratique, notamment, des horaires variables, des délais abrégés d'avertissement de ces horaires, des heures complémentaires. Les compensations accordées aux chômeurs qui acceptent un temps partiel pour échapper au chômage ont été progressivement réduites de sorte que le nombre des bénéficiaires a fortement décru.

Pour vérifier cela sur le terrain des entreprises, le Conseil de l'égalité des chances entre les hommes et les femmes a lancé, à l'automne de 2019 , une enquête dans 4 secteurs qui emploient une forte proportion de travailleurs à temps partiel. Le secteur du commerce emploie, pour plus de la moitié du personnel, des femmes dont 54 % travaillent à temps partiel. Dans les maisons de repos, 80 % du personnel est féminin dont 67% travaillent à temps partiel. Le secteur du nettoyage occupe 85 % de femmes dont 67 % à temps partiel. Enfin, dans les banques et assurances, des 53 % de femmes, 42% sont à temps partiel (mais plutôt à 4/5èmes).

L'enquête du Conseil avait pour objectif de creuser les raisons qui motivent le fait de travailler à temps partiel dans un contexte de progression considérable de cette forme d'emploi. Quoique les évolutions sectorielles montrent d'importantes différences, les réponses rencontrent manifestement ses hypothèses .

L'offre de travail est structurellement à temps partiel : dans les secteurs du commerce et des maisons de repos, entre 80 % et 90% ont toujours travaillé à temps partiel puisque seuls des contrats de ce type sont proposés. Trois quarts des personnes ont répondu qu'il n'y a pas de temps plein dans leur entreprise ou qu'il est difficile de l'obtenir, sauf à accepter plus de responsabilités dans les fonctions d'encadrement%u2026 lesquelles sont occupées dans grande proportion par des hommes.

Une part importante des répondants déclarent vouloir travailler plus. 33% dans le commerce et 45 % dans les maisons de repos aimeraient même un temps plein. En réalité, 80 % prestent des heures complémentaires et plus de 45 % le font régulièrement, avec un pourcentage un peu plus élevé chez les hommes (45%) que chez les femmes (30%). Parmi les raisons de ces prestations non prévues au contrat, ils notent la nécessité de compenser une absence (40 %), vouloir gagner plus (40 % pour le groupe de temps partiel involontaire et pour les hommes), pouvoir terminer son travail (secteur des finances), Ces raisons corroborent l'hypothèse que le travail à temps partiel n'est pas volontaire pour la majorité des travailleurs dont 18 % affirment que l'augmentation des heures est imposée par la hiérarchie. Une autre raison évoquée par 25 % est l'espoir de compenser en congés, ce qui attesterait probablement une envie d'avoir plus de temps pour la famille.

Les raisons le plus souvent citées montrent donc que le travail à temps partiel permet un ajustement de l'organisation des horaires qui deviennent plus flexibles, mais aussi une intensification des rythmes, ce qui aboutit à un accroissement de la pénibilité du travail. 80% dénoncent les recours trop fréquents à l'urgence, 75 % regrettent de ne pouvoir fournir un travail de qualité, 50 % estiment que leur santé en pâtit. Plusieurs témoignages font état de l'impossibilité de travailler plus d'heures dans ces conditions de flexibilité et de charge de travail accrue.

Le travail à temps partiel est majoritairement involontaire. Les raisons de travailler à temps partiel s'interpénètrent et nécessitent une négociation complexe entre les contraintes du travail professionnel et celles de la famille. De plus, les motivations changent au cours d'une vie, subissent les aléas de la santé. Toutefois, les raisons citées le plus fréquemment relèvent de l'organisation de travail (refus de l'employeur d'ajuster les contrats aux heures réellement prestées, situation économique de l'entreprise, pénibilité du travail en lui-même) et moins de la sphère privée.

Alors que selon l'enquête sur les forces de travail d'Eurostat, les raisons familiales ou personnelles au sens large, semblent être le principal motif du travail à temps partiel (45 % pour les femmes et 21% pour les hommes – données 2019), l'enquête révèle que les horaires des femmes à temps partiel qui ont des enfants ne sont pas différents des horaires de l'ensemble des travailleurs à temps partiel et ne sont donc pas de nature à faciliter la conciliation avec leurs responsabilités familiales (début et fin de journée). De plus, dans le secteur du commerce, 95% déclarent être soumis à des horaires variables avec un délai d'avertissement de presque trois semaines pour la moitié d'entre eux, tandis que dans les maisons de repos, 85% sont à horaires variables dont 64% sont avertis moins d'une semaine à l'avance. L'horaire peut d'ailleurs varier la veille ou le jour même (25% des répondants).

Les témoignages qui complètent les réponses expriment l'absence totale de maîtrise du temps de travail et d'aménagements favorables à l'organisation de la vie. Ils révèlent plutôt une accumulation des contraintes sans compensation en termes de revenus, pourtant indispensable pour assurer une autonomie décent

Contact : Dominique De Vos - domie.devos@outlook.com

Vous trouverez ici le rapport final de l'enquête sur le travail à temps partiel involontaire.

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